Yalisika

Lieu : Haute Cour Militaire en chambre foraine à Mbandaka (Province de l’Equateur), RDC

Référence de l’affaire : RPA 11/016

Prévenus et qualité au moment des faits :

  • Commissaire Supérieur KOYO MASOMBO Jean-Jacques
  • Lieutenant de vaisseau MBELE MBWILU
  • Commissaire MABUNGA Joseph
  • L’enseigne de vaisseau MBAMBA MALEBO LIPASA
  • Adjudant 1ère classe NBGONDO MBUWA Maurice

Parties civiles : 30 victimes se sont constituées parties civiles.

Résumé des faits : Le 2 mai 2011, quelque 60 policiers et militaires sont entrés dans le village de Bosanga situé dans le groupement de Yalisika, en province de l’Equateur. Lors de cette opération, de graves violations de droits humains sont commises : viols, coups, torture et destruction de biens. Cette opération constituerait des représailles à des actions des villageois qui avaient saisi certains biens de la Société Industrielle et Forestière du Congo (SIFORCO) pour forcer l’entreprise à engager un dialogue.

Le 14 décembre 2015, les prévenus ont été condamnés par la Cour Militaire de l’Equateur à des peines allant de 2 à 3 ans de prison pour crimes contre l’humanité, ne retenant que les instances de torture dans la qualification. La responsabilité civile de l’entreprise n’a pas non plus été reconnue.

Tant le Ministère public que les victimes ont par la suite interjeté appel : le premier pour que les peines soient revues à la hausse à la lumière de la gravité des faits et charges retenues ; les secondes pour que des réparations effectives leurs soient allouées face au caractère dérisoire des mesures de compensation ordonnées en première instance et que la responsabilité civile de toutes les personnes impliquées soit retenue.

Charges : Suivant la décision de renvoi, les prévenus sont poursuivis pour :

  • Refus de dénoncer une infraction ;
  • Crime contre l’humanité par emprisonnement ou par autre acte inhumain ;
  • Crime contre l’humanité par torture ;
  • Incitation des militaires à commettre des actes contraires à la loi et la discipline militaire ;
  • Arrestation arbitraire ;
  • Crime contre l’humanité par viol ;
  • Crime contre l’humanité par meurtre.

République Démocratique du Congo

La RDC demeure depuis 1996 le théâtre de graves violations des droits humains. En marge de la guerre dite de libération menée par les troupes de l’Alliance des Forces Démocratiques pour la Libération du Congo (AFDL) qui a porté Laurent Désiré Kabila au pouvoir en mai 1997, plusieurs groupes armés se sont formés, particulièrement dans la partie orientale du pays. Aux côtés des groupes armés nationaux, les groupes rebelles étrangers et les réfugiés ressortissants des pays voisins (rwandais, ougandais et burundais) se sont installés sur le territoire congolais et eux-aussi livrés à de nombreuses exactions. Dans ce contexte, plusieurs violations graves des droits humains ont été commises et continuent l’être malgré la fin déclarée de la guerre.

Un grand nombre de crimes commis relèvent des catégories de de « crimes internationaux » (crimes de guerre, crimes contre l’humanité et crime de génocide), qui tombent sous la compétence de la Cour pénale internationale, dont le Statut de Rome a été ratifié par la RDC dès 2002. La Constitution de la RDC consacre la suprématie du Statut de Rome sur la législation nationale et son application directe en droit congolais, tandis que le droit national réprime aussi ces crimes. La grande majorité de ces crimes reste toutefois impunie. Même si les juridictions militaires ont fourni des efforts significatifs en la matière, dans des conditions souvent difficiles, il reste encore beaucoup à faire au niveau des juridictions civiles de droit commun, qui se sont formellement vues reconnaître la compétence de juger des crimes internationaux en 2013.

C’est dans ce contexte que se poursuit le travail de lutte contre l’impunité des auteurs de crimes internationaux et de reconnaissance des droits des victimes en RDC. ASF y participe en fournissant notamment aux victimes des services d’aide légale, tout en s’assurant du respect des standards du procès équitable via la mise en œuvre d’une méthodologie d’observation des procès. Ce travail d’observation est assuré par des avocats formés à cet effet.