Nsumbu

Référence

RP n°357/2018

Pays

Congo (République démocratique du)

Kasaï Central

Base de données

Crimes Internationaux et Violations Graves des Droits Humains

Date de la décision

mars 16, 2021

Crimes/ violations

Association de malfaiteurs, Crimes de Guerre, Meurtre, Participation à un mouvement insurrectionnel, Pillage et destruction de Biens, Terrorisme, Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Parties impliquées

Défendeur : un prévenu membre du mouvement insurrectionnel Kamuina-Nsapu

Civilement responsable : République Démocratique du Congo

Parties civiles : 232 parties civiles

Résumé de la décision

Responsabilité de l’accusé

Le tribunal reconnait le prévenu coupable des crimes mis à sa charge pour en avoir personnellement commis certains (cas de torture, d’otage et des pillages) et pour en avoir ordonné et encouragé d’autres, notamment par sa présence active et son attitude devant les exactions de ses hommes (terrorisme, mouvement insurrectionnel, association des malfaiteurs).

Il sera condamné à la servitude pénale à perpétuité avec admission de la circonstance atténuante d’être père de famille nombreuse en ce qui concerne les infractions de terrorismes, mouvement insurrectionnel et association des malfaiteurs.

Responsabilité civile de la RDC

L’Etat congolais a été jugé par défaut, civilement responsable en sa qualité de commettant pour les actes du prévenu, qui a usé de sa qualité de chef traditionnel pour commettre les crimes

Réparations et indemnités

« le Tribunal note que les souffrances tant matérielles que morales qu’éprouvent toutes les parties civiles sont les conséquences directes et immédiates des crimes de guerre retenus à charge du prévenu » (p. 90). Par conséquent, il attribue les sommes suivantes aux parties civiles :

  • 20.000 à 25.000 USD pour les victimes de meurtre
  • 900 à 8.000 USD pour les victimes de pillage
  • 8.000 USD pour les victimes de torture
  • 8.000 USD pour les victimes de prise d’otage
  • 4.500 USD pour les victimes de destruction de propriété.
Résumé des faits

Entre 2016 et 2018, le Kasaï Central a été secoué par une escalade de violences. À l’origine, une dispute sur l’autorité coutumière a dégénéré en conflit armé entre le chef Kamuina Nsapu et le gouvernement.

Le 11 août 2016, les forces de l’ordre ont tué Kamuina Nsapu, déclenchant une insurrection violente. Les miliciens Kamuina Nsapu ont attaqué des villages dans le territoire de Kazumba entre février et mars 2017, incendié des maisons et tué des civils. Le conflit s’est intensifié, causant plus de 600 morts et de nombreux déplacés. En avril 2017, un secteur opérationnel militaire a été créé pour réprimer l’insurrection.

Résumé de la procédure
Éléments jurisprudentiels clés

Procédure

Dépositions des victimes : « Ces dépositions reçues sans prestation de serment ont néanmoins été prises en compte par le Tribunal dans le mesure où elles venaient corroborer des présomptions ou d’autres éléments de preuve et surtout lorsqu’elles présentaient une cohérence et une constance évidentes par rapport aux contradictions invraisemblances contenues dans le récit du prévenu. » (p. 24).

Substance du droit

Responsabilité Civile de L’état Congolais : « En tant que chef coutumier du groupement bakwa bwisha KATENDE depuis 2004, le prévenu NSUMBU est préposé de l’Etat Congolais qui est son commettant. Il est acquis que le prévenu avait été chargé par l’Etat d’une mission traditionnelle de sécuriser et protéger ses sujets et éventuellement ceux des groupements voisins ainsi que leurs biens. L’exécution de ladite mission engage la responsabilité de l’administration publique et des services décentralisés du fait des actes de leurs préposés ou organes. »

Réparation 

Évaluation du préjudice : les parties civiles ont présenté les préjudices subis de manière détaillée et individuelle sous forme d’un tableau (p. 52) :

  • Pour pillage : préjudices économiques liés à la perte des biens domestiques et des souffrances psychologiques aigues dues à la perte de leurs biens, ou manque de moyen de survie
  • Pour torture : des traumatismes physiques de leurs corps dus aux coups reçus et souffrances aigues 
  • Pour meurtre : la perte d’un être cher le privant dès sa présence et de son affection. La perte de la prise en charge assurée par les victimes directes et les différentes conséquences qui en ont résulté en termes des coûts économiques et sociaux
  • Pour prise d’otage : traumatismes liés à la perte d’être dû en cas ou leur famille n’avait pas à intervenir

Le Tribunal fixera les taux des réparations selon l’équité, ne disposant pas d’éléments objectifs d’évaluation faute de présentation des pièces comptables, factures d’achat de médicaments ou des frais d’hospitalisations, registres de stocks ou autres documents analogues ». Les sommes allouées respectent celles demandées par les parties civiles (p. 91).