Tsongo Sivitsomo Eugène et autres

Lien vers la décision : Cour Militaire Opérationnelle du Nord-Kivu

Référence

RP n° 159/2010

Pays

Congo (République démocratique du)

Nord-Kivu

Base de données

Crimes Internationaux et Violations Graves des Droits Humains

Date de la décision

septembre 30, 2020

Crimes/ violations

Crimes Contre l'Humanité, Crimes de Guerre, Destruction, Incendie, Meurtre, Participation à un mouvement insurrectionnel, Pillage et destruction de Biens

Parties impliquées

Défendeurs : 20 prévenus appartenant aux groupes armés Maï-Maï Mazembe et FDLR/FOCA.

Civilement responsable : République Démocratique du Congo.

Parties civiles : 159 parties civiles dont la République Démocratique du Congo

Résumé de la décision

En première instance, la Cour militaire du Nord-Kivu a reconnu la culpabilité de plusieurs prévenus pour crimes contre l’humanité, et a jugé l’État congolais responsable pour son incapacité à protéger les civils. En appel, les parties civiles ont contesté les réparations, jugées insuffisantes. La Cour a confirmé les condamnations et augmenté les réparations pour les victimes, couvrant les dommages physiques, psychologiques, et économiques.

Responsabilité pénale des prévenus

La Cour a reconnu la responsabilité pénale de 16 prévenus pour crimes contre l’humanité et crimes de guerre et a acquitté les 4 autres. Elle a prononcé des peines allant de la servitude pénale à perpétuité à des peines de 15 et 6 ans de servitude pénale, selon la gravité des faits reprochés et l’admission des circonstances atténuantes suivantes : casier judiciaire vierge, jeune âge, caractère frustre, délinquant primaire

Responsabilité civile de la RDC

La Cour a écarté la responsabilité civile de l’État congolais, soulignant l’absence de lien juridique direct entre les prévenus et l’autorité étatique, ces derniers ayant agi en dehors du cadre de l’État.

Réparations et indemnités

  • 15.000 $ US pour la mort d’une personne
  • 3.000 $ US pour les atteintes à l’intégrité physique ayant entraîné une perte ou un dysfonctionnement d’organe.
  • 2.000 $ US pour les maisons incendiées construites en matériaux non durables.
  • Montants pour pertes de biens : 400 $ US pour une vache, 250 $ US pour les effets ménagers, 40 $ US pour une chèvre, et 6 $ US pour une poule.
Résumé des faits

Entre 2015 et 2016, les territoires de Lubero et Walikale, situés dans la province du Nord-Kivu, ont été le théâtre de violences intenses opposant les groupes armés Maï-Maï Mazembe et FDLR/FOCA. Les prévenus sont accusés d’avoir commis des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, notamment des meurtres de civils et la destruction de biens, dans le cadre de représailles armées. De plus, ils ont été impliqués dans des mouvements insurrectionnels visant à défier l’autorité de l’État.

Résumé de la procédure
Éléments jurisprudentiels clés

Procédure

Preuve par aveu : La Cour rappelle que « les aveux, mêmes libres et spontanés, ne constituent pas toujours une preuve absolue de culpabilité ; ils constituent néanmoins des éléments de conviction pour le juge qui les apprécie souverainement, même en cas de rétractation ultérieure » Cela souligne la nécessité de corroborer les aveux par d’autres éléments de preuve avant de les accepter pleinement (p. 48).

Présomption de culpabilité basée sur un faisceau d’indices : La Cour a souligné l’importance des preuves indirectes, souvent appelées présomptions graves, précises et concordantes. Ces éléments doivent être corroborés par d’autres types de preuves, comme des témoignages ou des expertises, pour avoir une valeur probante significative (p. 62-63).

Réparation 

Montant des réparations : La Cour a ordonné des réparations pour les victimes des préjudices causés par les crimes commis, mais a limité la portée de ces réparations en écartant la responsabilité de l’État congolais. Les prévenus ont été tenus responsables in solidum pour compenser les victimes, y compris la restitution des biens, l’indemnisation des pertes matérielles, et la réhabilitation des personnes affectées. La Cour a statué sur les réparations à accorder aux parties civiles en appliquant le principe ex aequo et bono. Elle a accordé des montants supérieurs aux jurisprudence antérieures