
Cet article est issu du rapport annuel 2024 d’ASF.
En Tanzanie, ASF a soutenu le programme East Africa Emerging Public Interest Advocates Programme (EAEPIAP), mis en œuvre par le Center for Strategic Litigation. L’EAEPIAP est un programme de formation et de mentorat destiné aux jeunes professionnel·le·s du droit engagé·e·s pour la justice sociale et les droits humains. Ce programme vise à renforcer leurs compétences à travers une formation rigoureuse axée sur la pratique, afin de leur permettre d’utiliser le droit comme levier pour faire progresser la justice sociale et protéger les droits des communautés marginalisées.
La décision de soutenir l’EAEPIAP repose sur une analyse contextuelle. Dans toute l’Afrique de l’Est, l’espace civique est de plus en plus menacé. À mesure qu’il se restreint, de moins en moins d’organisations de la société civile se sentent en mesure de contester les violations croissantes des droits humains commises tant par des acteur·rice·s étatiques que non-étatiques. La diminution des financements destinés aux organisations de la société civile a également entraîné une baisse des ressources disponibles pour engager des recours juridiques, souvent longs et coûteux. Par ailleurs, les jeunes juristes sont de plus en plus attiré·e·s par des carrières dans le secteur privé, jugées plus lucratives et moins risquées, si bien que peu d’entre eux·elles s’engagent encore dans le contentieux d’intérêt public. Cette tendance est préoccupante, car elle menace la pérennité de la pratique du droit d’intérêt public, alors que les avocat·e·s les plus expérimenté·e·s prennent leur retraite et que les plus jeunes se tournent vers des carrières plus rentables.
Ce programme contribue à renforcer les compétences de certain·e·s des jeunes avocat·e·s les plus prometteur·se·s en matière de droits humains en Afrique de l’Est. Cette année, 14 jeunes avocat·e·s du Kenya, de Tanzanie, d’Ouganda et du Soudan du Sud en ont bénéficié. Le programme s’étend sur une année et se compose de trois phases : une formation intensive d’un mois en résidence, combinant cours théoriques, activités communautaires et mises en situation pratiques à travers des procès simulés ; un stage pratique de quatre mois et demi au sein d’organisations partenaires, sous la supervision d’un·e mentor dédié·e, axé sur la recherche, la rédaction juridique et le travail communautaire ; et enfin, un dernier séminaire de formation rassemblant les participant·e·s, formateur·rice·s et mentors pour un approfondissement pratique du plaidoyer en contentieux d’intérêt public, ainsi qu’une évaluation du programme et une réflexion collective sur les perspectives futures.
En 2024, les participant·e·s ont travaillé sur une grande diversité de thématiques : droits civils et politiques, droits reproductifs et droits des femmes, droits fonciers des populations autochtones dans le contexte de grands projets extractifs, droits de l’enfant et droits des personnes détenues.
L’objectif final du programme était que chaque participant·e dépose une action d’intérêt public en justice. Plusieurs affaires ont déjà été portées devant les juridictions nationales et régionales compétentes. ASF a soutenu l’organisation du dernier séminaire de formation, qui s’est tenu la dernière semaine de février, et qui visait à évaluer les actions en justice des participant·e·s avant leur dépôt. Le séminaire comprenait également des modules spécifiques de formation au plaidoyer et à la mobilisation de ressources pour les avocat·e·s d’intérêt public.