Contexte
Situé au cœur du Sahel, le Niger est l’un des pays les plus pauvres au monde, bien que ses sous-sols regorgent de ressources. Sa position géographique lui octroie le statut de ‘carrefour migratoire’, et fait du Niger à la fois pays d’origine, de transit et de destination des mouvements migratoires. Outre des difficultés liées à la pauvreté et au développement socio-économique, le Niger, comme ses pays voisins, est en proie à une crise sécuritaire majeure. Le pays est le théâtre de nombreuses attaques terroristes, particulièrement depuis 2011. Contrairement à la plupart de ses voisins de la région, le Niger a continué à miser jusque récemment sur une collaboration avec des forces étrangères, notamment la France, pour sa stratégie sécuritaire. Cette proximité est contestée par une partie toujours plus grande de la population. Le ressentiment de la population et sa méfiance envers cet interventionnisme étranger ont été mobilisés par la junte militaire pour justifier son coup d’État en juillet 2023.
Ce coup d’État intervient alors que le Niger avait élu à la présidence du pays Mohamed Bazoum, candidat proche du Président sortant, Mahamadou Issoufou, en 2021 lors de ce qui fut considéré comme la première transition démocratique de pouvoir dans le pays, malgré des manifestations de l’opposition qui dénoncent des fraudes. Le nouveau président avait promis de s’attaquer à la corruption et déclarait vouloir relancer le dialogue avec la société civile.
Après deux ans, les espoirs d’un bon nombre de citoyen.ne.s n’avaient toujours pas obtenu de réponse. Le prix de la vie, la situation sécuritaire, la fermeture et la dégradation d’un grand nombre d’établissements scolaires ainsi que la restriction des libertés publiques constituaient des préoccupations importantes pour la société civile et les détenteur.e.s de droits.
Les libertés publiques
Plusieurs nouvelles lois et législations adoptées ces dernières années étaient déjà jugées comme pouvant porter atteinte aux droits et libertés de la population nigérienne. Les refus presque systématiques des manifestations, la loi sur le terrorisme ainsi que d’autres nouvelles législations comme la loi contre le trafic illicite des migrants de 2015, la loi sur la cybercriminalité de 2019 et la loi sur l’interception des communications électroniques de 2020 ont été dénoncées par les organisations de défense des droits humains en raison des graves atteintes à la liberté d’expression, de mouvement et à la vie privée.
Conditions de la justice et des droits humains
En 2021, 130 avocat.e.s étaient enregistré.e.s à l’unique Barreau du Niger, situé à Niamey. Aucun cabinet d’avocat est installé en dehors du capital. En 2021, la part de budget du ministère de la Justice représentait seulement 0,49% du budget total de l’État.
Au Niger, l’accès à la justice est loin d’être garanti pour la population. La justice dite ‘moderne’ reste globalement inaccessible à la population. Les cours et tribunaux ne sont que très faiblement déployés sur le territoire alors que 85% de la population vit dans des zones rurales. Les populations locales ont encore largement recours à la justice dite ‘traditionnelle’ pour régler leurs conflits et leurs différends.
Le droit ‘moderne’ et la justice ‘traditionnelle’ coexistent donc au Niger. Et même si la loi nigérienne reconnaît la compétence de la justice ‘traditionnelle’ dans certains domaines, les deux systèmes peinent toujours à se coordonner efficacement. Des barrières géographiques, sécuritaires, économiques, sociales et culturelles continuent d’entraver l’accès à la justice. Le secteur de la justice souffre d’un manque structurel et chronique de financement et les réformes nécessaires du système judiciaire peinent à voir le jour.
Les conditions de détention
La surpopulation carcérale est endémique dans les prisons principales du pays, les infrastructures sont vétustes et l’accès aux soins de base et à une alimentation saine et en quantité suffisante ne sont pas garantis. 70% de la population carcérale au Niger est en attente de jugement.
La stratégie d’ASF
ASF veut accompagner les acteur.rice.s de changement au Niger afin de promouvoir l’état de droit et de garantir la sécurité des citoyen.ne.s. Ces conditions doivent être remplies pour permettre aux populations locales de contribuer activement au développement socio-économique de leur pays. Pour ce faire, ASF priorise le renforcement de l’accès à la justice et la mise en place d’espaces de dialogue et de concertation entre institutions et justiciables.