Entre méfiance et espoir: le regard des jeunes sur la gouvernance locale en Tunisie

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Tunis, le 22 mai 2018 – Depuis près de trois ans, ASF et IWatch soutiennent l’implication et la participation constructive des citoyens tunisiens dans la gouvernance locale en matière de gestion des ressources naturelles. Une enquête sur la perception des jeunes a été menée dans les régions extractives de Tataouine et Médenine. L’analyse des résultats dévoile leur méfiance envers les institutions politiques, à l’aube des élections municipales du 6 mai dernier. Le vent de contestation qui a balayé la Tunisie en 2011 n’a pas fini de souffler, en particulier sur les régions Sud du pays, encore en proie à des nombreux défis sociaux, économiques et environnementaux. Malgré leur fort potentiel en ressources naturelles, elles affichent des taux élevés de chômage et de pollution, ainsi qu’une désertification inquiétante. Premières victimes de cet état de fait, les jeunes sont à l’initiative de nombreux mouvements sociaux revendiquant plus de transparence et de redevabilité des entreprises publiques et privées ainsi qu’un meilleur partage des richesses issues de l’exploitation des ressources naturelles. A travers une enquête de terrain, ils confient leur vision, leurs espoirs et leurs attentes. L’enquête répond à deux objectifs : donner la parole aux jeunes citoyens de Tataouine et Médenine en matière de démocratie locale et de gestion durable des ressources, et permettre aux élus municipaux, d’apprécier le degré de confiance que ces jeunes accordent aux institutions locales et nationales. Entre novembre et décembre 2017, 650 personnes âgées entre 18 et 35 ans ont été interrogées dans les deux gouvernorats. Un fil conducteur relie la plupart des réponses : la forte méfiance des sondés vis-à-vis des institutions étatiques et des partis politiques – seul l’échelon local fait exception, avec un taux de confiance relativement positif. Si les jeunes cultivent un fort sentiment d’appartenance régionale et nationale, ils sont peu optimistes quant à l’avenir de leur pays. Ils sont d’ailleurs majoritaires à ne nourrir aucun espoir de voir leurs conditions de vie s’améliorer au cours des trois prochaines années. Malgré un faible taux d’inscription aux élections municipales (45%), ils ont conscience de l’importance de la démocratie participative. Mais la transparence douteuse des élections et le manque d’informations dû au faible débat public et médiatique, freinent leur engagement dans la vie sociale et politique. Tout en étant le secteur principal en matière de développement économique, les ressources naturelles demeurent fortement méconnues. 69% des jeunes jugent négativement la gestion actuelle des ressources et pensent que le gouvernement manque à son devoir de contrôle et de surveillance des activités extractives. En dépit de cette méfiance généralisée, une grande majorité des jeunes sondés accordent encore un espoir à l’action collective et la citoyenneté. 58% d’entre eux ont indiqué être prêts à s’impliquer personnellement dans la lutte pour la transparence dans le secteur énergétique. ASF et IWatch appellent à la mise en place de mécanismes de démocratie participative et de gouvernance ouverte, afin de renforcer la connaissance et l’engagement de tous. Il revient à l’Etat tunisien de renforcer son contrôle sur la gestion des activités extractives et aux organisations de la société civile, aux syndicats et aux partis politiques, d’être d’avantage présents et accessibles dans les régions du Sud, afin d’offrir aux jeunes des cadres structurés de participation à la vie politique et citoyenne.
L’enquête a été officiellement présentée le 27 avril à Tunis © ASF
>> Télécharger l’enquête Les élections municipales dans les régions extractives : le regard de la jeunesse sur la gouvernance locale
Photo de couverture: le sondage s’est fait sous forme de questionnaire papier, présenté en face à face © ASF