Contexte général
La Tanzanie, le plus grand pays d’Afrique de l’Est, est une union des États du Tanganyika et de Zanzibar. Contrairement à certains de ses voisins, elle n’a jamais connu de conflit violent durable, du moins sur le continent. Depuis l’indépendance du pays en 1961, le pays est dominé par le parti unique Chama Cha Mapinduzi (CCM). La Tanzanie a connu un net recul en matière de démocratie et d’espace civique sous la présidence de John Magufuli (2015 – 2021).
Lorsque l’actuelle présidente Samia Suluhu Hassan lui a succédé en 2021, elle a affirmé sa volonté d’annuler les restrictions des libertés publiques qui avaient été imposées par son prédécesseur. Son gouvernement a levé les interdictions et restrictions en matière de presse et de rassemblements politiques. Le principal chef de l’opposition et ancien candidat à la présidence, Tundu Lissu, est rentré en Tanzanie après plus de deux ans d’exil en Europe et a organisé, avec les partisans de son parti, le Chadema, son premier grand rassemblement politique en janvier 2024. Malgré ces avancées importantes, le gouvernement actuel n’a pas encore révisé les lois restreignant la liberté d’expression et d’association qui ont été adoptées sous le règne de Magufuli. Récemment, des activistes qui représentaient des groupes marginalisés et d’autres qui dénonçaient un accord portuaire avec les Émirats arabes unis ont été réprimés par les autorités. La présidente Samia Suhulu Hassan a également été critiquée pour avoir retardé les réformes constitutionnelles qu’elle avait promis d’entreprendre avant les élections locales de 2024 et les élections générales de 2025.
L’industrie extractive est devenue ces dernières années un des moteurs principaux de l’économie Tanzanienne, le secteur minier représentant 9.7% du PIB du pays en 2022.
La transition énergétique et le développement de nouvelles technologies pour produire des énergies renouvelables engendrent une demande exponentielle en minerais au niveau mondial. La Tanzanie, qui dispose de sols riches en ressources, y voit une opportunité pour développer l’activité économique dans son pays. Son gouvernement a signé un accord pour accueillir l’oléoduc est-africain (EACOP), le plus long oléoduc chauffé au monde, qui devrait transporter le pétrole du lac Albert, en Ouganda, jusqu’au port de Tanga, en Tanzanie.
Ces projets d’extraction en Tanzanie sont la source de nombreuses préoccupations en matière de droits humains, notamment la dégradation de l’environnement, les expulsions forcées, la perturbation des moyens de subsistance et la violence à l’égard des communautés, en particulier des femmes. Dans le contexte de l’augmentation des opérations minières et de la construction de l’EACOP, la question de l’accès à des recours effectifs pour les communautés affectées par les industries extractives est une priorité essentielle pour ASF.
L’action d’ASF en Tanzanie
Dans le cadre du programme DGD2, financé par la Coopération Belge au Développement ASF, IPIS, Hakirasilimali et BHRT se sont associés pour mener un projet qui vise à donner aux communautés tanzaniennes et aux organisations de la société civile les moyens d’enjoindre le gouvernement et l’industrie à favoriser un accès à la justice effectif, le respect des droits humains et une bonne gouvernance dans le cadre des activités des entreprises extractives.
Le projet se concentre sur le secteur extractif (pétrole, gaz, mines et forêts) et couvre quatre régions, à savoir Tanga, Mara, Shinyanga et Manyara.
Ses trois principaux objectifs sont de : (i) documenter les violations des droits humains ; (ii) favoriser l’accès aux recours et (iii) faciliter les dialogues fondés sur des données probantes afin de promouvoir des réformes positives.
Le rôle principal d’ASF est d’aider les demandeur‧euse‧s de justice à accéder à des recours judiciaires ou non-judiciaires pour les violations des droits humains à travers des d’activités de renforcement des capacités pour les prestataires de services d’aide juridique et les communautés touchées. Compte tenu des risques encourus par les défenseur‧e‧s des droits humains, ASF entend également assurer la protection juridique de ceux‧elles qui font l’objet d’arrestations arbitraires ou d’autres formes d’intimidation. Enfin, ASF utilisera le contentieux stratégique pour faire avancer les droits des communautés ainsi que des objectifs sociaux et politiques plus larges liés à l’industrie extractive.