Bruxelles, le 28 mai 2014 – Dominique Kamuandu est le coordinateur des programmes de justice internationale au Congo d’Avocats Sans Frontières (ASF). Il a récemment pris la parole dans le cadre d’un Forum consacré au soutien et à la protection des défenseurs des droits de l’Homme (DDH). Cet évènement était organisé à Bruxelles par l’Instrument Européen pour la Démocratie et les Droits de l’Homme (IEDDH).
Question : Qu’il s’agisse d’avocats, de membres de la société civile ou de journalistes, pourquoi les DDH ont-ils besoin de protection ?
« Que ce soit en Afrique, en Amérique Latine ou en Asie, les DDH ne sont pas bien perçus car ils dénoncent les violations des droits de l’Homme commis par leurs gouvernements et/ou des groupes armés. Ils subissent des menaces et intimidations qui visent à les réduire au silence : des appels téléphoniques anonymes, arrestations, enlèvements, harcèlements et dans le pire des cas, des assassinats.
Au Congo, les DDH travaillent dans un contexte particulièrement fragile. D’une part, la démocratie et l’Etat de droit ne sont pas encore assez consolidés car la RDC est en train de sortir d’une guerre. Les priorités sont la paix et la sécurité, et non les droits de l’Homme. D’autre part, le pouvoir exécutif contrôle officieusement le pouvoir judiciaire, ce qui empêche ce dernier d’agir en toute indépendance et liberté ».
Q : ASF a lancé un programme de protection des DDH soutenu par l’Union Européenne en 2011. Quelle est l’action concrète d’ASF ?
« Il y a de nombreux DDH en demande de soutien et de protection au Congo et ASF n’est pas la seule organisation qui les défend. Nous avons un rôle de complémentarité et travaillons à plusieurs niveaux. Tout d’abord, nous apportons une protection légale aux DDH. Celle-ci leur permet de faire entendre leur voix via leurs avocats et de lutter contre l’impunité des criminels. Ensuite, nous pouvons assurer une protection physique lorsqu’il y a une réelle menace. Il s’agit de sécuriser leur résidence, leur lieu de travail ou alors de les délocaliser, parfois avec leurs familles. Enfin, nous coordonnons une action de plaidoyer en vue de faire adopter une loi pour la défense des droits de l’homme.
Notre programme ne bénéficie pas seulement aux avocats car nous aidons également les journalistes ayant besoin d’assistance dans l’exercice de leur profession ».
Q : Plusieurs organisations prennent en charge la protection des DDH. Quelle est, selon vous, la valeur ajoutée d’ASF ?
« Nous avons joué un rôle déterminant dans la révision du projet de loi portant sur la protection des droits de l’homme au Congo. Un projet de loi avait vu le jour en 2011 mais a ensuite été laissé à l’abandon. Suite à un atelier sur la stratégie nationale de protection des droits de l’homme organisé par ASF en novembre 2013, un comité de suivi dédié à ce projet de loi s’est mis sur pied. Ce comité, composé d’acteurs institutionnels et de la société civile, a revisité le projet de loi et le nouveau texte a été endossé par un député en février dernier. Il fait maintenant l’objet d’une proposition de loi devant le Parlement et est en attente d’être voté.
Entre-temps, nous poursuivons notre travail afin de venir en aide aux DDH, ces personnes ordinaires qui prennent des risques extraordinaires ».