Bujumbura (Burundi) le 10 septembre 2014 – Avocats Sans Frontières (ASF) appelle la justice burundaise à mettre fin aux multiples irrégularités qui bloquent depuis plus d’un an l’avancement de l’affaire de l’assassinat d’Ernest Manirumva. Cet appel suit le cinquième report de l’audience du 4 septembre dernier de la Cour suprême de Justice du Burundi pour examiner cette affaire emblématique. Alors que ce procès continue de s’enliser devant le plus haut tribunal du pays, la famille d’Ernest Manirumva, grand défenseur des droits humains, et l’ONG dans laquelle il œuvrait, l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (OLUCOME), persévèrent dans leur quête de justice.
L’assassinat d’Ernest Manirumva le 9 avril 2009 a donné lieu à l’un des procès les plus suivis des dernières années au Burundi. Le premier jugement ordonné par le Tribunal de Grande Instance de Bujumbura en mai 2012 a été fort critiqué tant par la société civile burundaise que par les accusés et les parties civiles. Tous s’entendaient alors pour exiger des mesures d’enquête complémentaires afin d’identifier les vrais responsables du crime. Le jugement en appel rendu en janvier 2013 n’a pas non plus su répondre à ces attentes. Les parties civiles ainsi que certains prévenus ont donc déposé un pourvoi en cassation en juin 2013.
Or, depuis novembre 2013, le dossier a été fixé en audience publique par la Cour suprême de Justice du Burundi à pas moins de cinq reprises et ces audiences ont toutes été remises à des dates ultérieures. La Cour a systématiquement négligé les démarches visant à assurer la bonne préparation des audiences et à permettre à toutes les parties concernées d’être présentes. La dernière audience publique de la semaine dernière a connu le même sort.
« Ces irrégularités de procédure qui empêchent le dossier de suivre son cours normal se multiplient », constate Céline Lemmel, Chef de mission ASF au Burundi. « Les tribunaux doivent préparer les audiences de manière à ce que la justice soit rendue de façon équitable, tant pour les victimes que pour les prévenus, et ce dans des délais raisonnables », rappelle-t-elle.
Après plus de cinq ans de procédures judiciaires, les parties civiles au procès Manirumva s’impatientent à obtenir justice. « Le recours pendant devant la Cour Suprême est capital. Il vise à examiner une série d’éléments d’insatisfaction relevés dans le cadre de l’appel, comme l’absence d’équité des débats pour les parties civiles et l’absence de motivation de la cour quant aux refus de leurs demandes », précise la Chef de mission d’ASF.
L’enjeu du procès Manirumva est important pour les parties au procès, mais aussi pour les défenseurs des droits humains qui poursuivent leur travail au Burundi et attendent impatiemment des réponses de la justice burundaise. C’est pourquoi ASF appelle les autorités judicaires burundaises à mettre un terme aux délais récurrents et aux irrégularités dans l’examen de cette affaire ; la bonne tenue de la prochaine audience publique doit être assurée, et ce dans le strict respect du devoir de diligence à l’égard de toutes les parties au procès.