Contexte
Les printemps arabes ont été la source de changements majeurs dans la région du sud de la Méditerranée mais le Maroc n’a pas connu de mouvements sociaux de l’ampleur de ceux qui ont émané en Tunisie ou en Algérie au début des années 2010. Malgré cela, le Maroc a adopté une nouvelle constitution plus libérale en 2011 et des réformes législatives encourageantes, se présentant sur la scène régionale et internationale comme un Etat fortement engagé dans un processus de démocratisation et de réformes en matière d’Etat de droit.
Cependant, malgré cette nouvelle constitution, ces nouvelles législations et la ratification des principaux instruments internationaux relatifs aux droits humains, la population marocaine ne peut pas aujourd’hui jouir effectivement et pleinement des droits consacrés dans ces différents textes. La Constitution consacre par exemple le principe d’égalité entre hommes et femmes comme principe fondamental, mais, sur le terrain, la société civile ne constate toujours pas les changements attendus et le pays peine à combattre efficacement les violences et les discriminations basées sur le genre.
Les intentions réformatrices affichées par les autorités marocaines et la substance des différents textes adoptés et ratifiés doivent encore se traduire en changements effectifs en faveur des personnes en situation de vulnérabilité, dont les femmes, les personnes âgées, les mineur.e.s, les personnes migrantes, etc. La société civile a un rôle essentiel à jouer pour s’assurer que ces réformes soient pleinement implémentées.
Conditions de la justice et des droits humains
Au Maroc, le taux d’incarcération demeure très élevé (237 détenu.e.s pour 100 000 habitant.e.s). Environ 88.000 personnes sont détenues, dont près de 45% sont en attente d’un jugement, alors que les prisons du pays ont une capacité d’accueil de +- 53.000 détenu.e.s (ce qui représente une surpopulation carcérale de 156%).
Les détenus condamnés à des peines allant jusqu’à 2 ans de détention, pour des délits mineurs donc, représentent la moitié de la population totale et les jeunes hommes entre 20-30 ans y sont surreprésentés (45%).
Les peines de prison sont également une « double peine » car elles contribuent non seulement à la surpopulation structurelle des prisons et aux mauvaises conditions qui en découlent, mais ont également des conséquences négatives pour les détenu.e.s et leurs familles, en particulier les plus pauvres. La détention entraîne systématiquement une perte de revenu et de l’emploi et appauvrit donc davantage les ménages déjà vulnérables.
La « Charte pour la réforme du système judiciaire », adoptée en 2013, peine à donner des résultats convaincants, si l’on considère que les tant attendues révisions du Code de procédure pénale et du Code pénal pour les rendre conformes à la nouvelle Constitution n’ont pas encore abouti. La pandémie du Covid-Sars2 est venue accroître les épisodes répressifs, avec plus de 90.000 arrestations de citoyen.ne.s constatées en 2020, déclenchant des poursuites, des condamnations et, in fine, des incarcérations qui sont venues encombrer des prisons déjà surpeuplées.
La stratégie d’ASF
ASF veut accompagner la société civile marocaine dans sa lutte pour contribuer à un Maroc pluriel, démocratique, égalitaire, respectueux des droits humains, fondé sur les principes de la justice sociale et du développement durable. Pour ce faire, ASF renforce le pouvoir d’agir des justiciables en situation de vulnérabilité dans la revendication et la réalisation de leurs droits, en s’appuyant sur l’interdisciplinarité des acteur.rice.s pour assurer un accompagnement global.