Lutte contre les violences basées sur le genre au Myanmar : l’expérience d’un avocat pro bono

Myanmar, le 28 mars 2018 – Les violences basées sur le genre (VBG) constituent une problématique socio-économique importante au Myanmar. Pour les combattre efficacement, la justice birmane doit se doter de nouveaux leviers d’action. En collaboration avec ActionAid International, ASF fournit expertise technique et conseils pour améliorer l’accès à la justice pour les personnes à risque et/ou ayant souffert de telles violences. Membre de l’International Legal Network d’ASF, Lionel Blackman, a contribué bénévolement au projet. Il partage avec nous son expérience. « Beaucoup parlent encore de ‘violence domestique’, or les VBG ont une portée plus large : elles ne se limitent pas aux comportements abusifs au sein du foyer, mais concernent également le harcèlement au travail et les agressions sexuelles commises par des inconnus dans des lieux publics », affirme Lionel Blackman (au centre sur photo). Au cours de sa mission de trois semaines au Myanmar fin 2017, il a pu constater l’inefficacité de la justice à offrir une assistance juridique aux personnes victimes de VBG : « Le numéro d’urgence mis en place n’est pas adapté à la situation dans de nombreuses régions et à bien des égards. L’Etat ne propose pas de service d’aide clairement défini et intégré pour les survivant(e)s de VBG. La justice, elle, ne dispose pas des mécanismes nécessaires pour traiter les plaintes les moins graves (et quel que soit la gravité de la plainte, diraient certains) ». Dans ce contexte et compte tenu des normes culturelles en vigueur, qui placent les hommes au-dessus des femmes, de nombreuses organisations non-gouvernementales proposent un accompagnement aux survivant(e)s de VBG. « Dans le but d’assurer une meilleure coordination entre les services proposés par les ONG et d’autres acteurs, tels que les avocats et les services médicaux, ASF et ActionAid International mettent en place des réseaux d’orientation, dans le township Hlaingtharyar à Yangon et dans l’Etat Môn », explique Lionel Blackman. Son expérience en tant que directeur du Solicitors International Human Rights Group, ainsi que son expertise en droit pénal et international, ont été très bénéfiques pour ce projet. Ses compétences en création de bases de données ont été particulièrement mises à contribution : « Plus encore que mes compétences juridiques, ces dernières se sont avérées utiles et pratiques pour développer le réseau de référencement ». Selon Lionel Blackman, cette mission a clairement été un succès pour ASF, qui suscite beaucoup d’espoirs pour une coopération fructueuse à l’avenir : « Ce fut un vrai plaisir de travailler avec nos partenaires au Myanmar. Ils ont été réceptifs aux conseils et ont fait preuve d’une grande volonté d’apprendre et de partager leur expérience. Il y a encore beaucoup à faire pour étendre los réseaux d’orientation dans nos zones cibles – nous les avons déjà bien étendus. Il faut toutefois garder à l’esprit que dans ce pays encore récemment sous le contrôle d’un régime répressif, plusieurs générations ont été privées du sens de l’initiative. Les acteurs étrangers doivent donc à tout prix éviter de prendre le contrôle,et au contraire s’efforcer à encourager la prise d’initiatives indépendantes. » Sur le plan personnel, Lionel Blackman décrit une expérience très enrichissante : « Après une carrière dans l’aide juridique en Angleterre, c’est avec satisfaction que je mène cette action pro bono, particulièrement dans un pays tel que le Myanmar, où les systèmes de justice laissent encore à désirer. »
Lancé en 2010, l’ILN rassemble actuellement plus de mille professionnels du droit du monde entier engagés à soutenir les programmes internationaux d’ASF et ses missions sur le terrain.

Myanmar: les « pro bono » en action

Myanmar, le 27 avril 2015 – Le projet pilote de Centres pour l’état de droit est maintenant terminé. Ce projet vise à renforcer les compétences des professionnels du droit et de la société civile en matière justice, ainsi qu’à les encourager à intégrer les principes de l’état de droit dans leur travail. Sept experts légaux, membres de l’International Legal Network (ILN) d’Avocats Sans Frontières, ont accepté de servir bénévolement cette cause.

Sept membres de l’ILN – les « pro bono », comme les surnommaient affectueusement les membres de l’équipe en charge du projet – ont eu l’occasion de participer à la mise en place du projet pilote de Centres pour l’état de droit au Myanmar. Venus des États-Unis, du Royaume-Uni, d’Australie ou encore de France, les membres de l’ILN ont partagé leur expertise en matière de droit pénal, de droit de la famille, de droit administratif, de droit international et de droits de l’homme. Ils ont mis leurs connaissances au service l’équipe de projet, composée de formateurs nationaux et internationaux, en vue de concevoir un programme, de développer des modules de formation et d’accompagner les activités de sensibilisation auprès des communautés.

« Lors de mon premier jour, on m’a demandé de travailler avec une formatrice nationale, Nway Nway, afin de passer en revue le projet de cursus qu’elle avait préparé », raconte Larissa Dinsmoor (photo de couverture), avocate en Californie « Nous nous sommes assises l’une en face de l’autre pour discuter de la manière dont les informations seraient communiquées aux autres. Même si nous venions à peine de nous rencontrer, nous nous sommes tout de suite senties à l’aise et il y avait un véritable respect mutuel entre nous. J’ai appris d’elle et elle a appris de moi. Au final, nous avons fait du bon travail ». Larissa était basée à Lashio, une ville pluriethnique dans le nord-est du Myanmar. Le projet pilote se déroulant sur une courte durée, une pression immense pesait sur les épaules des membres de l’équipe : il fallait en peu de temps préparer des cours et produire des documents de formation de qualité. Larissa se rappelle : « Nous avons tous travaillé les uns avec les autres et nous avons bénéficié de l’expérience, des connaissances et de la vision de chacun. Les avocats internationaux et ceux du Myanmar ont formé un groupe soudé, ce qui nous a permis de faire la différence », précise Larissa. Mais elle nous confie avec un clin d’œil : « Mon meilleur souvenir, ce sont les éclats de rire. Malgré les innombrables heures de travail pour rédiger, réviser et mettre en place le programme, les membres de l’équipe ont toujours gardé le sourire et leur joie de vivre. Une telle atmosphère renforce les liens. »

Claire Fenton-Glynn, membre de l'ILN © ASF
Claire Fenton-Glynn, membre de l’ILN © ASF

L’un des enjeux importants du projet était de garantir l’engagement sans faille de l’équipe du Myanmar et des participants. Par conséquent, le contenu et les activités prévus faisaient chaque semaine l’objet d’une discussion par les formateurs internationaux, en collaboration avec les formateurs nationaux. Claire Fenton-Glynn (photo) est professeur de droit au King’s College de Londres. Elle a passé un mois à Mandalay, la deuxième plus grande ville du Myanmar. Elle a particulièrement apprécié cette méthodologie. « En travaillant de cette manière, les formateurs nationaux et les participants eux-mêmes pouvaient s’approprier le processus. Nous étions simplement là pour faciliter leur apprentissage, plutôt que pour le dicter », explique-t-elle.

Et Claire Fenton-Glynn de conclure : « Ce fut vraiment très positif de voir les progrès accomplis grâce au développement de compétences analytiques, et de savoir la différence que cela pourrait faire à l’avenir dans la manière d’aborder le droit, et la vie en général, dans un pays qui commence à peine à se relever après de nombreuses années de dictature militaire ».

Lancé en 2010, l’ILN regroupe aujourd’hui plus d’un millier de professionnels du droit du monde entier, qui s’engagent à soutenir les programmes d’ASF et ses missions sur le terrain.

Le projet pilote mené par ASF et ses partenaires au Myanmar était soutenu par le Programme des Nations Unies pour le développement. Sur le même sujet, voir aussi le récent article sur l’éducation à l’État de droit au Myanmar.

Photo de couverture : Larissa Dinsmoor, avocate au barreau californien, était l’une des sept membres de l’ILN impliqués dans le projet © ASF

« Fournir de l’aide légale, c’est donner de l’espoir »

Kampala, le 27 février 2014 – Afin de soutenir l’accès à la justice des personnes en situation de vulnérabilité, encourager l’aide légale gratuite est primordial. Avocats Sans Frontières (ASF), en partenariat avec l’ Uganda Law Society (ULS), mobilise des avocats pour défendre les droits fondamentaux des Ougandais. Akello Suzan Apita (voir photo) fait partie des 16 avocats engagés dans cette action.

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L’accès à justice reste difficile pour les personnes les plus vulnérables, Ouganda, 2013 © ASF – G. Van Moortel

Afin de rendre la justice accessible à tous, il est essentiel de fournir une aide légale gratuite (pro  bono) à ceux qui n’ont pas les moyens de se payer ces services. En Ouganda, les avocats ont commencé à fournir ces services sur base d’une obligation fixée par la loi que depuis 2009.

L’une des pierres angulaires des programmes d’ASF et de l’ULS est de développer un esprit « pro bono » chez les avocats. Le rôle social de l’avocat tient particulièrement à cœur à Maître Akello Suzan Apita : « Je viens du nord de l’Ouganda, où beaucoup de gens, y compris ma famille, ont souffert de la violence de l’Armée de résistance du Seigneur (LRA). J’ai eu la chance d’étudier à Kampala grâce à une bourse. Peu après mes études, j’ai pratiqué le droit dans le cadre du projet Aide légale de l’ULS dans le bureau régional du nord, d’où je suis originaire. »

Des services d’aide légale de bonne qualité sont grandement nécessaires pour les personnes incarcérées. « Les détenus n’ont pas d’accès à un avocat. Personne ne défend leurs droits. Dès lors, en apportant une aide légale aux prisonniers, nous leur donnons de l’espoir et leur offrons un avenir auquel ils ne rêvaient même plus », ajoute-t-elle.

En tant qu’avocate pro bono, Mme Apita est en première ligne : « Je voie la souffrance des gens et les privations qu’ils subissent. Ils ont perdu leur maison et leurs biens. Je me bats pour qu’ils recouvrent leurs droits et leur dignité et pour qu’ils puissent améliorer leurs conditions de vie. »

L’accessibilité des services d’aide légale est cruciale pour l’amélioration de la qualité de la vie. Une meilleure protection de leurs droits aura un impact positif immédiat sur leurs conditions de vie et aura des conséquences à long terme sur leur statut économique, ce qui contribuera à réduire la pauvreté.

« Être passionnée par la défense des droits de l’Homme est une chose ; produire des résultats en est une autre. Il est dès lors primordial d’améliorer nos compétences en tant qu’avocats et ASF nous aide sur ce point-là », explique Mme Apita. ASF et l’ULS organisent des formations et s’occupent de la supervision des avocats pro bono afin d’améliorer leur capacité à protéger les droits des populations les plus marginalisées mais aussi à influencer le gouvernement pour qu’il accorde davantage de soutien à ces services primordiaux. « La plupart des Ougandais pensent que la justice est réservée aux riches. Il faut que ça change ! Bien entendu, nous n’avons pas la capacité d’atteindre tout le monde. Mais au moins, quand nous aidons les gens, nous voyons leur visage s’éclairer d’un sourire. Et ça, c’est la plus belle des récompenses », conclut Mme Apita.

Depuis le lancement de ce programme financé par la Coopération belge au Développement, quelques 200 avocats ont été mobilisés dans le cadre du projet et ont pu fourni gratuitement des services d’aide légale aux Ougandais aux quatre coins du pays.

Photo de couverture: Kampala, Ouganda, 2013 © ASF – G. Van Moortel

A la recherche de juristes experts pro bono

Bruxelles, 2 septembre 2013 – L’International Legal Network (ILN) d’Avocats Sans Frontières (ASF) offre la possibilité aux avocats de s’engager bénévolement et ponctuellement en faveur des populations vulnérables en besoin d’assistance légale et judiciaire. Aujourd’hui pourtant, malgré ses 800 membres, ce réseau manque de professionnels du droit spécialisés dans des domaines spécifiques comme la justice pénale internationale ou encore l’organisation de services d’aide légale.

Maître Julie Goffin est avocate au Barreau francophone de Bruxelles et membre de l’ILN. Son engagement en faveur des droits de l’Homme ne date pas d’hier. « Mes parents, déjà, étaient engagés dans ce domaine. En tant qu’étudiante experte, j’ai assisté aux négociations lors de l’adoption du Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour Pénale internationale (CPI). C’était en 1998… à Rome », se souvient-elle. Depuis, Maître Goffin a consolidé son expérience en droit des étrangers, droit humanitaire et surtout en droit pénal international. Elle fait d’ailleurs partie de l’équipe d’avocats représentant, à la CPI, une partie des victimes dans les dossiers Katanga et Ngudjolo, tous deux accusés de crimes contre l’humanité et de crimes de guerre en RD Congo.

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Formation sur la justice pénale internationale à Bukavu, juin 2013 © ASF / G. Van Moortel

C’est donc tout naturellement qu’ASF a fait appel à elle pour animer un atelier deformation sur la justice pénale internationale et le système du Statut de Rome. C’était à Bukavu, ville frontalière avec le Rwanda, en juin dernier. L’objectif était de renforcer les capacités des avocats membres du pool d’ASF en RD Congo en matière de pratique professionnelle et de stratégie d’action. « Il est essentiel de favoriser les échanges d’expériences entre avocats chargés d’assister ou de représenter des victimes de  violations graves des droits humains et des crimes internationaux. Durant ces cinq jours de formation, j’ai trouvé mes confrères congolais très ouverts et très engagés dans la lutte contre l’impunité », témoigne-t-elle.

Créé en 2010, l’ILN met en avant le rôle essentiel des avocats internationaux auprès de leurs confrères travaillant dans des pays où le développement de l’Etat de droit n’est pas encore acquis. Avec l’accroissement des activités d’ASF dans le secteur du renforcement technique des avocats, ce réseau est rapidement devenu une source incontournable d’expertises. « Depuis sa création, les membres de l’ILN ont accompli pas moins de 86 interventions, totalisant 620 jours travaillés. Cet apport a grandement contribué au renforcement des capacités des acteurs locaux », se réjouit Catherine Lalonde, Coordinatrice du réseau.

« Pourtant aujourd’hui, nous manquons de membres dans des domaines tels que la représentation en justice pénale internationale, le cadre international des droits économique et sociaux, le traitement de dossiers de corruption », constate Catherine Lalonde. « Les candidats avec des profils de magistrats, procureurs, et professeurs, ou encore compétents dans l’organisation de services d’aide légale, sont également particulièrement demandés ».

Après une forte phase de développement, le réseau ILN est face à un défi : comment répondre au mieux aux besoins identifiés dans le cadre des projets ASF afin d’accroitre l’efficacité et la qualité des services offerts aux populations les plus vulnérables ? Pour sa part, Julie Goffin sort enrichie de sa mission de formation à Bukavu : « Que ce soit au Congo ou ailleurs, nos confrères nous donnent une vraie leçon de courage car ce sont eux qui prennent tous les risques. Partager nos compétences avec eux, c’est faire preuve de solidarité ».

Pour plus d’information sur l’ILN

Photo de couverture :  « Partager nos compétences avec eux, c’est faire preuve de solidarité. » Julie Goffin, avocate et membre de l’ILN ; Bukavu (RDC), 2013 © ASF / G. Van Moortel

Aux 500 professionnels du droit engagés aux côtés d’ASF : merci !

Bruxelles, 26 mars 2012 – L’International Legal Network (ILN), le Réseau international des avocats créé par ASF en 2010, a le plaisir d’accueillir son 500e membre. L’arrivée de ce nouveau membre témoigne de la solidarité des professionnels du droit en faveur des justiciables pris en charge par ASF. Basé sur le principe d’interventions en pro bono, le réseau ILN est devenu un levier incontournable dans le développement des activités de l’organisation. Son succès repose d’abord et avant tout sur l’engagement sans faille de ses membres.

En deux ans, l’ILN a contribué à l’action d’ASF par le biais de 63 interventions dans une douzaine de pays : formation des avocats locaux, assistance judiciaire, observation de procès ou encore recherches juridiques. Effectuées sur le terrain ou à distance, ces missions représentent plus de 400 jours de travail. Signe de la diversité grandissante de l’ILN, les membres du réseau sont originaires d’une soixantaine de pays des hémisphères Nord et Sud, présentant des intérêts et des niveaux d’expérience aussi variés que complémentaires.

ILN interventions also bring lawyers in contact with the reality on the field (the women’s prison in Gitega, Burundi, by Charlotte Verhaeghe)
Les missions ILN sont aussi l’occasion de « vivre » la réalité du terrain (ici la prison pour femmes de Gitega au Burundi par Charlotte Verhaeghe)

Catherine Lalonde, Coordinatrice de l’ILN : « Nous proposons aux membres de contribuer à nos projets en fonction de leur domaine d’expertise. Leurs interventions nous permettent de démultiplier l’impact de nos actions sur le terrain et de proposer un encadrement pointu aux avocats locaux ».

Cette dynamique de partage et de mise en commun d’expériences entre les professionnels du droit de tous les horizons est au cœur de l’action d’ASF et de l’ILN. Lecoaching en est une parfaite illustration. Ainsi, des avocats burundais et rwandais ont récemment pu bénéficier de la présence d’avocats expérimentés pour les assister dans la gestion et la prise en charge de dossiers complexes (cas de violences sexuelles, de torture, d’atteintes à la liberté d’expression ou de détention préventive illégale). Une formule innovante qui répond à une réelle demande.

« L’enthousiasme des confrères locaux est grand, les moyens sur place le sont souvent beaucoup moins », témoigne Charlotte Verhaeghe. Pour cette avocate au Barreau de Bruxelles qui revient d’une mission de coaching au Burundi, « en assistant ces avocats dans le suivi de dossiers, ASF fait vraiment la différence. ».

Les besoins en assistance étant en continuelle évolution,  l’ILN doit constamment enrichir son réseau de nouveaux profils. « En plus des profils plus traditionnels, nous rechercherons par exemple des juristes arabophones spécialisés en droit international des droits de l’Homme, des avocats expérimentés dans le domaine des négociations ou des criminalistes détenant des connaissances approfondies des mécanismes de justice transitionnelle », ajoute Catherine Lalonde.

En attendant l’apport de ces nouvelles expertises, ASF remercie chaleureusement les 500 membres du réseau ILN qui soutiennent l’action d’ASF et, par cet engagement, contribuent à faire du droit un moteur de changement durable pour les plus vulnérables.

Pour joindre l’ILN

Mr Alexis Deswaef, ILN member, during the Olucome trial in Burundi © Jean-Marie Ndikumana/ASF
Me Alexis Deswaef, membre de l’ILN, lors du procès Olucome au Burundi © Jean-Marie Ndikumana/ASF

Du Barreau de Bruxelles au tribunal d’Haïfa

Maître Maryse Alié est avocate au Barreau de Bruxelles et membre de l’International Legal Network d’ASF. Dans ce cadre, elle a participé à plusieurs missions d’observation judiciaire du procès emblématique « Rachel Corrie » à Haïfa (Israël), et animé au Burundi des sessions de formation sur le rôle de l’avocat dans la prévention du crime de torture.

Unknown ObjectMaître Alié, qu’est-ce qui vous a motivée à vous investir dans l’International Legal Network d’ASF ? 

Après mes études de droit, j’ai pu acquérir un master en coopération au développement, option droit comparé, et un master en droits de l’homme. J’ai ensuite travaillé pour diverses organisations internationales, dont plusieurs années au Bureau du Haut Commissariat aux droits de l’homme au Cambodge et à la Cour pénale internationale. Avocate à Bruxelles, il me paraissait donc tout naturel de m’investir via l’action d’Avocats Sans Frontières et de répondre à la demande qui m’a été faite de rejoindre l’ILN.

Concrètement, en quoi ont consisté vos interventions ?

La formation au Burundi était un projet développé avec plusieurs confrères bruxellois et consistait en un séminaire de plusieurs jours, basé sur le partage d’expériences avec un groupe d’avocats congolais, rwandais et burundais rassemblés pour l’occasion à Bujumbura.

L’objectif visait l’amélioration du travail de ces avocats dans les dossiers « torture » que leur confie ASF dans leurs pays respectifs. Nous avons donc développé des modules d’activités et cas pratiques incluant un travail de réflexion en lien avec les éléments constitutifs des actes de torture, la rédaction de plaintes, le développement de conclusions, les stratégies de défense, la préparation de la plaidoirie, etc.

Quant au procès Rachel Corrie c. le Ministère de la défense israélien, il s’agit d’assurer une observation judiciaire du procès en cours devant le tribunal de district d’Haifa via des missions ou un suivi à distance. Je collabore avec un juriste irlandais, spécialiste des problématiques « droits de l’homme » dans le contexte israélo-palestinien.

Bien entendu, notre travail comporte des analyses juridiques et la rédaction de rapports détaillés au bénéfice d’ASF. Cette intervention, bien que complexe et délicate, est particulièrement intéressante vu les enjeux du procès et les questions de droit qu’il implique.

Qu’avez-vous appris de ces expériences ?

Énormément !  Ce sont avant tout des expériences humaines qui permettent de rencontrer d’autres confrères tant à Bruxelles que sur le terrain, sans compter le très dynamique staff d’ASF ! Même si les challenges sont toujours au rendez-vous (ou peut-être aussi grâce à eux), travailler dans le cadre d’échanges internationaux est bien évidemment enrichissant. Entre autres aspects positifs, on peut citer : la confrontation à d’autres systèmes judiciaires, le partage d’expériences, de cultures, de projets, beaucoup de difficultés et de barrières aussi… sans compter les moments d’humour !

Bien sûr, il faut éviter tout droit-de-l’hommisme ou attitude néocolonialiste et mieux vaut ne pas être naïf : c’est un travail qui n’est qu’une goutte d’eau dans l’océan… mais l’engagement en vaut la chandelle !

Votre engagement dans l’ILN est-il compatible avec votre pratique professionnelle d’avocate en Belgique ?

Oui tout à fait ! Certes, des aménagements au niveau des audiences sont nécessaires, mais les missions sont généralement assez courtes ce qui ne crée pas de grandes difficultés d’organisation. En outre, une partie du travail peut se faire à Bruxelles (recherches factuelles et juridiques, analyses, rédactions de rapports, etc.)… et si partir en mission peut être compliqué pour certains confrères, il est toujours possible de s’engager dans des activités qui ne nécessitent pas de déplacement à l’étranger.

Pour plus d’information sur l’International Legal Network d’ASF