Cet article est extrait du rapport annuel 2021 d’Avocats Sans Frontières.
Depuis 2014, plus de 20.000 personnes ont perdu la vie en tentant de traverser la Mer méditerranée pour rejoindre l’Europe depuis l’Afrique. Une des raisons principales derrière ce lourd bilan humain : la décision des États membres de l’Union européenne de fermer les voies d’accès sûres et légales à l’Europe.
Cette politique est favorisée par une intolérance croissante à l’égard de la migration, un durcissement de la répression des étranger.ère.s, considéré.e.s comme une menace pour la sécurité nationale, et les dérives toujours plus autoritaires des États européens. C’est pour ces raisons que le bureau Europe-Méditerranée d’ASF, basé à Tunis, fait désormais de la question migratoire une de ses priorités stratégiques.
En 2021, l’organisation a lancé une action conjointe avec le Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES) et l’Association d’études juridiques sur l’immigration (ASGI) dans le but de venir en aide aux Tunisien.ne.s victimes de rapatriement forcé d’Italie. Sa position particulière permet à l’équipe d’ASF en Tunisie de produire une expertise pertinente et contextualisée en partant des données collectées sur le terrain et en lien avec les stratégies de plaidoyer de l’organisation.
Avec ses partenaires, ASF s’attelle à collecter, dans le cadre de consultations juridiques, des informations susceptibles d’améliorer la connaissance et la compréhension des mécanismes de contrôle menant au rapatriement systématique des Tunisien.ne.s depuis l’Italie. Les données récoltées mettent en évidence l’existence d’un dispositif discriminatoire à l’égard des Tunisien.ne.s, les empêchant d’exercer leur droit à la liberté de circuler. Pire encore, la détention au sein des hotspots et des centres de rapatriement les maintient dans un état de grande précarité économique, physique et psychologique, ce qui nuit à leur chance de réinsertion en Tunisie.
Le monitoring des conditions de détention au sein des hotspots et des centres de rapatriements s’inscrit dans le cadre d’une approche « sans frontières » qui dénonce le caractère arbitraire et contre-productif des politiques migratoires des États membres de l’Union européenne. Durant toutes les étapes de leur parcours migratoire, les migrant.e.s sont l’objet de maltraitance et de diverses pratiques dégradantes. Cette politique se révèle d’autant plus inefficace que la plupart des migrant.e.s rapatrié.e.s tenteront à nouveau de traverser la Méditerranée. ASF appelle les États européens à respecter leurs engagements et à mettre en place des politiques humaines et respectueuses des droits humains en matière de migration.